Deco, Kids & co.
21 Février 2015
Bonjour à tous,
Hier, l'édition "spéciale mode" du mois de mars du magazine Elle Belgique est sortie en kiosque. Classiquement, on nous présente les tendances des cat walks, un peu de people bashing et un dossier incroyablement intéressant sur le "Mercato de la mode" (qui part? qui reste?).
Sauf qu'au mois de mars, il y a aussi le 8 mars... Journée Internationale de la Femme et qu'il est de bon ton, même si on s'en fout 364 jours par an, d'embrasser la noble cause des femmes.
Du coup à la rédac de Elle Belgique on s'est dit : "Ouais les filles, pas de bol, cette année la journée de la femme va encore tomber en même temps que notre Special mode. On s'en fout, mais faut quand même qu'on en parle alors trouvez moi des idées"...
C'est là que la community manager de Elle a une super idée :
- "Ouais, demain sur le feed facebook, je poste sur la detox, la manucure, donc pas vraiment de place pour un billet sur le thème, mais dans le cadre du concours pour la promo du numéro, je peux toujours poser une question sur l'émancipation des femmes, à la limite."
- "Ah ouais, super! Demande la date de la dépénalisation de l'avortement. C'est hyper important ça et puis c'est engagé à fond. N'empêche c'est ringard le féminisme. Vous avez pas une idée pour rendre ça fun et sexy".
- "Ah ouais, samedi aux Jeux, il y a l'attaché presse de Charles Michel qui a proposé un shooting pour dire qu'il est féministe".
Du coup ça donne ça!
Alors moi, je suis choquée :
Si notre premier a l'occasion de faire une comm gratos (en tout cas, on ose espérer), on va pas le lui reprocher. Je veux même bien accepter qu'en tant qu'individu, il soit sensible à la cause des femmes. Cependant, c'est un FAIT que le gouvernement dont il est le chef est un gouvernement tout à fait misogyne. Et le rôle des journalistes (à supposer qu'il y en a à la rédaction de Elle) est de faire une analyse critique des politiques en Belgique et identifier comment elles défavorisent les femmes ou au contraire, contribuent au renforcement de leur rôle dans la société.
Quand je fais cet exercice, je m’aperçois que ces dernières années (sous le gouvernement du féministe en carton Ch. Michel, mais aussi sous le gouvernement précédent), les femmes sont les premières précarisées. Parmi les mesures les plus éloquentes :
- l'exclusion des chômeurs (60% sont des femmes)
- la fin de l'exemption pour des raisons sociales et familiale (concerne pour 90% les femmes)
Je suis pourtant convaincue que le life style est compatible avec du journalisme de qualité. Je déplore que Elle s'évertue à prouver le contraire.
Dans son livre Françoise, Laure Adler - qui n'a pas son pareil pour mettre en avant les destins de femmes d'exception (Hanna Arendt, Marguerite Duras, Simone Weil notamment) - revient sur les débuts du magazine Elle, dont la direction de la rédaction est confiée à Françoise Giroud.
"Françoise Giroud, écrit L. Adler, n'aura de cesse de défendre l'autonomie intellectuelle des femmes en politique, ainsi que leur droit d'avoir des enfants sans passer par la case mariage". Cette ligne éditoriale est reprochée par Pierre Lazareff, co-créateur du journal. Celui-ci répète à Fr. Giroud que "la lectrice type est une habitante d'Angoulême, âgée de trente à trente-cinq ans, mariée et mère d'un à trois enfants".
Pourtant Françoise Giroud a plus d'estime et d'ambition pour son lectorat et le ton plait à la nouvelle génération.
Ce qui fait un grand magazine, c'est d'anticiper et de provoquer les changements, pas de suivre mollement une tendance tiède.
Des vrais féministes à mettre en avant il y en a. Je pense par exemple le Dr. Mukwege, gynécologue congolais qui répare les femmes abusées et violentées sexuellement. Singulièrement cet homme n'a jamais eu besoin de mettre un t-shirt pour affirmer son féminisme.